Être un individu
Tu l’as voulu, tu es né. Tu t’es dressé dans ce vide où le public n’est plus qu’un anneau de brume bientôt perdu dans le lointain. Matador, voici ton arène. Qu’elle est parfois brillante au débouché du tunnel ! Que la foule, la femme t’appellent ! Elle t’a jeté son gant, tu le ramasses… Puis la partie s’engage et tu t’y découvres seul. Le temps passe, et à chaque instant l’illusion se dissipe. Et cependant le jeu continue, dont la pratique seule peut t’enseigner les règles, que toutes sortes d’accidents compliquent. Les secondes, qui sont des jours puis des mois, passent ; le soleil troue parfois la bourrasque, mais invinciblement la nuit vient. L’ombre de l’adversaire grandit, tandis que décline la force qui tient l’épée. Maintes sanglantes banderilles sont posées, jusqu’à l’estocade finale qui est donnée par la corne du plus noir de tous les Minotaures.
Une seconde nature, Sang de la terre, 2012